La coopération entre l’Algérie et les Etats-Unis d’Amérique n’est plus l’apanage d’un seul secteur à savoir celui des hydrocarbures. La coopération entre deux pays s’étend à d’autres secteurs. Dans cet entretien qu’il a bien voulu accordé à « timesalgerie », Smail Chikhoune, président du Conseil d’affaires algéro-américains (USABC), revient avec plus de détails sur les investissements américains en Algérie hors hydrocarbure. Le constat du président de l’USABC sur cette coopération est reluisant. Il met en exergue cet intérêt particulier accordé par les entreprises américaines au secteur de l’agriculture et l’industrie pharmaceutique. Suivez-le
Par Smail. B
Tout d’abord, pouvez-vous nous dresser un état des lieux de la coopération économique algéro-américains ?
Le partenariat algéro-américain est en train de se développer davantage. Il y a un accroissement réel chaque année par l’introduction de nouveaux investissements dans des secteurs qui n’existaient pas auparavant. Le tout dernier est celui de l’agriculture. Le 15 octobre écoulé, nous avons invité des agriculteurs de l’État de l’Utah. Ils sont prêts à travailler ici en Algérie dans le cadre d’un partenariat dans tous ce qui est production de lait, fermes de vaches laitières, aliments de bétail, l’irrigation, recyclage, introduction du solaire dans les fermes. C’est pour vous dire que l’agriculture qui n’existait pas avant, maintenant elle a un intérêt et des répondants aussi ici en Algérie. Ils ont pu discuter en B2B avec des agriculteurs et des entreprises algériennes.
Ensuite, nous avons le pharmaceutique. Des partenariats ne s’arrêtent pas dans ce secteur aussi important et stratégique pour l’Algérie. Il sera question de discussions sur une feuille de route sur le projet de création d’un cluster dans la santé. Ça sera un forum qui se tiendra le 4 et 5 novembre et nous allons rencontrer des officiels des ministères de la Santé, du Travail, du Commerce et de l’Industrie. Donc, il y a une dynamique d’un accroissement de la coopération en dehors du traditionnel secteur de l’énergie. Même dans l’énergie, l’Algérie se lance dans l’offshore. Donc, il y a des services aux puits, le forage, la canalisation qui peuvent intéresser les Américains.
Donc derrière tout ça, il y a énormément d’expertise américaine à rajouter. Et Puis, nous avons d’autres coopérations ou il y a des compagnies algériennes qui représentent des entreprises américaines.
Nous affirmons tous le temps qu’il ne faut pas voire uniquement le marché algérien, mais il représente une porte d’entrée vers d’autres pays du Sahel et d’Afrique. Il ne faut pas oublier les infrastructures routières, ce sont des atouts pour le pays. Nous avons aussi le taux de croissance, pour les Américains, il est en Afrique et non pas en Europe ou en Amérique du Sud. D’ailleurs, Trump est en train de voir comment se redéployer en Afrique.
Maintenant, c’est à la partie algérienne de trouver les bons partenaires et puis d’avoir une vision à long terme pour attirer les investissements.
Quels sont les secteurs qui intéressent davantage les américains ?
Il y a plus d’une centaine de compagnies américaines qui activent en Algérie. Près de 70% sont dans le Oil and gaz et les services. Dans la technologie, nous avons Oracle, Sisco, Intel, Microsoft, Adobe. Beaucoup d’administrations algériennes utilisent les softwares américains. Il y a aussi des compagnies qui sont dans la construction notamment dans le Sud. L’intérêt des Américains est dans le Oil and gaz évidemment. Mais, actuellement nous voulons mettre le paquet dans le secteur de la santé. Nous essayons d’intéresser les laboratoires à venir ici en partenariat avec Saidal ou des industriels privés. En d’autres termes, ce que nous voulons faire c’est aller vers la recherche et développement.
Justement qu’en est-il du projet du pôle de biotechnologie ?
Il y a eu une incompréhension de la part de l’Algérie. Il était question de développer énormément de la recherche et développement. Dans un laboratoire pharmaceutique, nous avons 80 % des dépenses qui vont à la recherche et 20 % pour la fabrication. Parce qu’il faut trouver les meilleurs traitements et médicaments. Le principe, c’est de réduire les effets secondaires et d’accroître les indications thérapeutiques. Sur ce volet, nous avons eu l’idée de faire de l’Algérie un quatrième pôle. Nous voulions attirer des investissements dépensés dans les trois grands pôles qui sont Boston pour les Amériques, l’européen à Dublin et le troisième c’est Singapour qui surpasse les deux premiers. Aujourd’hui, un chercheur coûte cher.
Aux États-Unis, c’est 300 000 dollars par an. Quand nous avons décidé de lancer ce projet, nous avons dit aux Américains qu’en Algérie nous disposons d’un capital humain important, des étudiants qui terminent avec un très bon niveau de graduation. L’idée était donc d’attirer les capitaux investis dans les autres pôles. A titre d’exemple, en 2017 l’ensemble des laboratoires américains ont dépensé 175 milliards de dollars. Ce sont ces laboratoires qui vont financer ces recherches afin de développer des molécules ici Algérie. Le développement d’une molécule peut aller jusqu’à 10 ans et pourrait coûter jusqu’à un milliard de dollars.
L’investissement dans un laboratoire pharmaceutique doit répondre à trois paramètres à savoir l’enregistrement de la molécule rapidement (trois mois au Singapore), le respect de la propriété intellectuelle, et la facilitation de pouvoir s’installer. C’est ce que nous voulions réaliser en Algérie, inviter tous ces acteurs et se lancer dans la recherche et développement.
Donc, le projet a mis du temps. Avec le nouveau ministre de la Santé, nous avons rediscuté du projet. Nous avons eu une autre approche, c’est la plus faisable dans l’immédiat. Il s’agit de créer un Cluster santé. Ça sera la discussion du prochain forum. Maintenant, nous allons voir quels sont les intervenants et les parties concernées et de créer un coordinateur. Donc, les 4 et 5 novembre prochain, nous allons identifier les acteurs qui doivent intervenir ainsi que la feuille de route du projet. Bien sûr que les résultats ne viendront pas au bout d’un an ni deux ans mais à partir de cinq ans.
Nous, nous voulons créer cette dynamique de laboratoire de recherche avec des chercheurs et des sujets de recherche. Nous voulons aussi intéresser tous les laboratoires et pas uniquement américains. Tous ensemble pour être sûrs de sa réussite. Ça permettra de créer de l’emploi à l’avenir.
Donc, ça sera la nouvelle démarche en synergie avec les universités et de l’industrie par la suite. Cet incubateur aura pour objectif de créer des startups.
Hormis certaines multinationales, les PME américains sont très peu présentes en Algérie. Quelles sont les raisons de cette situation ?
Oui, beaucoup d’entreprises américaines n’ont pas la tradition de venir en minorité. En quelques sortes le 51/49 ne les arrange pas. Ces entreprises ont l’esprit business, pouvoir faire des bénéfices et revendre par la suite facilement. Il y a aussi celles qui acceptent dont GE et Varian. On ne peut pas dire qu’elles n’acceptent pas toutes ou l’inverse mais le gros veut travailler à 100%. Cette loi de 51/49 n’est pas propre à l’Algérie, elle existe ailleurs. L’Algérie est en droit de la garder pour les secteurs stratégiques. Mais dans d’autres secteurs ou le pays peut avoir facilement le transfert de technologie, il faut commencer à réfléchir à la modifier. Parce que pour certaines petites entreprises c’est un handicap.
Il y a quelques grands projets dans l’agriculture, l’automobile ou la pharmacie des projets d’investissements. Peut-on connaître leur situation ?
Depuis 2014, nous avons rencontré des responsables de Ford pour l’automobile. Ils ont montré un intérêt pour l’Algérie. Mais je ne connais pas les détails. Je pense que si le ministre de l’Industrie a affirmé hier que beaucoup de compagnies sont intéressées dans l’assemblage, Ford en est une des compagnies qui portent cet intérêt.
Pour le projet de la ferme des vaches laitières d’El Bayadh, c’est la presse qui a interprété mes propos durant le dernier Forum. Le projet n’est pas fini. C’est le premier du genre pour les deux partenaires, donc il y a eu évidemment des discussions. Mais on ne veut pas dire qu’il est fini. Je n’ai pas les détails. D’ailleurs c’est grâce à ce projet que les Américains ont vu qu’il y a un potentiel dans la production laitière en Algérie. Des agriculteurs de l’Utah ont accepté. Ils sont une douzaine.
Le projet de l’Utah va nous ramener d’autres investissements. Donc, le projet n’est pas à l’arrêt et déformer l’information peut freiner d’autres investissements. Il faut savoir que pour réaliser une ferme, il faut un architecte designer pour sa réalisation, une société d’équipement pour le confort de la vache, le nutritionniste, le spécialiste de l’aliment, de l’irrigation et de l’environnement. C’est ce que demande une ferme de vache laitière. Donc, le consortium est constitué de toutes ces parties qui interviennent, chacun dans son domaine, pour sa réussite. Réaliser un tel projet nécessite donc de l’innovation. Maintenant, la production de lait est également robotisée.
Comment évaluez-vous les perspectives du partenariat algéro-américains ?
Je suis très optimiste. Pour cette année 2018, nous avons battu tous les records du nombre d’évènements. Même à Washington le département du Commerce n’arrête pas de nous féliciter du travail et des évènements que nous avons organisé ici en Algérie et aux États-Unis. Nous avons organisé la semaine économique et culturelle de l’Algérie à Washington. C’est la première du genre de tous les pays africains et arabes. C’est pour vous dire que le Conseil d’affaires est arrivé aujourd’hui à un niveau où il intervient dans cette coopération. Nous avons invité des investisseurs dans l’agriculture il y a une semaine.
Après demain, nous aurons des entreprises dans l’énergie, et les 4 et 5 novembre c’est l’industrie pharmaceutique. Du 10 et 14 décembre prochain, nous invitons des distributeurs et des grossistes américains pour voir comment l’on fabrique le produit algérien et des usines aux standards international dans l’agroalimentaire et l’électronique. En 2018, nous avons organisé 13 évènements soit une moyenne d’une rencontre par mois. Ce travail nous le réalisons en collaboration avec les deux ambassades des deux pays.
S.B