Le ministère de la Justice a annoncé le parachèvement de l’élaboration de la première mouture du projet de réforme du tribunal criminel, sachant que le groupe de travail chargé de cette mission avait déposé son rapport fin septembre dernier.
Le ministère a précisé sur son site officiel que ce rapport élaboré par un groupe de travail composé de magistrats de la Cour suprême, examine les différentes problématiques soulevées en matière de réforme du tribunal criminel et il en est arrivé à la proposition de la mouture du projet d’amendement des dispositions juridiques afférentes à cette juridiction.
Au regard de l’importance de cette question, le ministre de la Justice, Garde des sceaux, a ordonné l’élargissement de la consultation à toutes les juridictions, à la Cour suprême et au Conseil d’Etat ainsi qu’à l’Union nationale des ordres des avocats, aux enseignants universitaires et spécialistes des domaines judiciaires et juridiques, et ce pour contribuer à l’enrichissement de la mouture finale de cet amendement.
Se basant sur l’étude comparée, ledit rapport expose les différentes expériences adoptées par d’autres pays en cette matière, de même qu’il comporte une série d’amendements proposés inhérents à la composante et à la compétence du tribunal criminel ainsi qu’à la tenue de ses sessions.
Il s’agit également de l’évaluation de l’expérience algérienne dans l’adoption du système des jurys en matière criminelle, en relevant ses avantages et ses inconvénients.
« Au regard des inconvénients du système des jurés, il s’avère que le modèle du système des magistrats professionnels est le plus approprié dans le système juridique pénal algérien ». Ainsi, « il convient de renoncer définitivement au système des jurés populaires et de maintenir la composante professionnelle tripartite », ont estimé les auteurs des propositions.
Entre autres inconvénients auxquels se sont référés les rédacteurs du rapport, le fait que le juré, à savoir: « le juge populaire », n’a pas assez de connaissances en matière de droit procédural et substantiel, notamment les affaires spéciales telles que celles issues de l’utilisation des technologies.
Qui plus est, l’intime conviction du juré se construit souvent à partir des informations obtenues en dehors de l’audience, comme il peut subir l’influence rapide des médias ou des rumeurs, ce qui est « aux antipodes des principes du droit à un procès indépendant et impartial, consacré par la Constitution et les conventions internationales ».
Dans ce contexte, il a mis en avant une autre raison liée à la divergence de vues des jurés, en sus du risque que l’un d’entre eux prenne une décision précipitée, notamment dans les affaires qui durent longtemps.
Tous ces facteurs réunis exposent le juré au risque de perdre le contrôle sur le déroulement du procès.
Ladite proposition tend également à alléger les charges financières supplémentaires relevant des dépenses de la justice pénale, sachant que «le montant des dépenses effectuées lors des sessions criminelles des tribunaux criminels de première instance et des Cours d’appel ont été estimées à plus de 52 milliards de centimes», selon le même rapport.
Parmi les autres raisons citées dans le rapport, le fait que le système de jury «soit sans référence historique», vu que dans les pratiques coutumières on ne retient que les termes conciliation et réconciliation qui « n’ont rien à voir avec la prononciation des peines», et ce de par que le système de jury «ne repose sur aucune légitimité religieuse», partant du fait que «la religion musulmane est stricte sur ce point, en confinant la mission de justice aux personnes aux aptitudes scientifiques et intellectuelles avérées», de l’avis des auteurs de ces propositions.
Ainsi, intervient la proposition d’abroger l’alinéa 3 de l’article 258 du code de procédure pénale lié à la composante du tribunal criminel de première instance et de la Cour d’appel lors du jugement des affaires criminelles liées au terrorisme, à la drogue et à la contrebande.
Le rapport relève, dans ce sens, plusieurs «lacunes» entravant le travail de ces juridictions dans leur composante actuelle, à l’origine dans certains cas de « divergence » tranchée par la Cour suprême concernant plusieurs peines criminelles émises par différentes juridictions, dont la prononciation de deux peines dans un même dossier procédural, le premier relatif aux crimes de droit public et le second aux crimes spéciaux, et ce bien que la composante des deux instances compte les mêmes magistrats professionnels.
Dans le cadre du principe de double degré de juridiction adopté par le législateur algérien «il est recommandé de veiller à ce que la composante de chaque degré soit différente de l’autre en termes de grades», avec le maintien de la composante tripartite compte tenu du nombre réduit de juges conseillers et afin de permettre aux juges de s’acquitter pleinement de leurs missions ordinaires et partant garantir un service de justice de qualité».
R. N.